CŒUR - Cardiologie

CŒUR - Cardiologie
CŒUR - Cardiologie

Les maladies du cœur (cardiopathies ) et celles des vaisseaux représentent actuellement en France et dans les pays industrialisés la première cause de mortalité, avant le cancer et les accidents de la circulation. Au cours des dernières décennies, le profil général des maladies cardiovasculaires s’est modifié. Les affections des valves cardiaques d’origine rhumatismale ont presque disparu dans les pays socio-économiquement développés, grâce au contrôle des infections amygdaliennes d’origine streptococcique, et les endocardites par greffe bactérienne sont le plus souvent stérilisées par des antibiotiques de plus en plus puissants.

Avec l’accroissement de l’espérance de vie, les lésions des valves cardiaques d’origine dégénérative et notamment le rétrécissement calcifié de l’orifice aortique, les ruptures de cordage mitral d’origine dystrophique ont pris une place croissante dans la pathologie valvulaire cardiaque. Les maladies congénitales ont été traitées de mieux en mieux et de plus en plus tôt par la chirurgie qui permet la réparation totale dans la plupart des cas. Le lourd tribut payé par les maladies cardiovasculaires repose essentiellement sur les conséquences de l’athérosclérose des vaisseaux et/ou de l’hypertension artérielle qui aboutissent à l’ischémie, transitoire ou permanente, de tissus mal irrigués, au premier plan desquels figurent le cœur (cardiopathies ischémiques secondaires aux lésions des artères coronaires) et le cerveau (maladies cérébro-vasculaires). Cependant, un déclin significatif de la morbidité et de la mortalité d’origine cardiovasculaire se manifeste depuis quelques années, que l’on peut attribuer non seulement à une meilleure approche diagnostique et thérapeutique médico-chirurgicale, mais aussi à une meilleure éducation du public grâce aux campagnes de prévention destinées à mettre en garde contre les «facteurs de risque» d’athérosclérose, représentés essentiellement par le tabagisme, l’hypercholestérolémie et l’hypertension artérielle.

1. Interrogatoire et examen physique des patients

L’interrogatoire représente un temps essentiel de l’examen. Le médecin recherche des facteurs génétiques tels qu’antécédents familiaux de cardiopathie ischémique (angine de poitrine, infarctus du myocarde, mort subite), d’hypertension artérielle ou de troubles métaboliques (hyperlipidémie, diabète sucré) et enquête sur les habitudes alimentaires et l’hygiène de vie (tabagisme, consommation de graisses saturées d’origine animale, œnolisme, activité physique).

L’interrogatoire permet d’analyser les symptômes qui orientent sur une pathologie cardiovasculaire (douleurs de poitrine, essoufflement, palpitations, pertes de connaissance, enflure des jambes) et il est très souvent décisif pour établir le diagnostic d’une angine de poitrine ou d’une syncope brève.

L’examen physique n’a rien perdu de son intérêt, en dépit du développement des moyens d’exploration complémentaires: inspection de la paroi thoracique et de la base du cou, palpation de l’aire précordiale à la recherche d’un choc anormal ou d’un frémissement lié à la difficulté de passage du sang à travers un orifice rétréci et surtout l’auscultation du cœur (fig. 1) à la recherche de souffles pouvant traduire le mauvais fonctionnement d’une ou de plusieurs valves cardiaques ou la présence d’une cardiopathie congénitale. L’existence d’un frottement à l’auscultation est souvent la seule expression de l’inflammation du péricarde. La présence de bruits surajoutés aux deux bruits normaux du cœur permet à une oreille bien éduquée de reconnaître une altération du muscle cardiaque (bruits de galop), une atteinte valvulaire (claquements correspondant à l’ouverture de valves pathologiques ou à un prolapsus de la valve mitrale) ou plus rarement péricardique.

La prise de la tension artérielle , aux deux bras, en position couchée et debout fait partie de tout examen cardiovasculaire. Les pouls sont recherchés aux extrémités. Le stéthoscope explore la «projection» des gros vaisseaux: recherche d’un souffle sur les vaisseaux du cou, auscultation de l’abdomen et de la racine des membres inférieurs. Un œdème des membres inférieurs, un gros foie sensible à la pression, des râles à l’auscultation des bases pulmonaires traduisent l’engorgement des tissus par la rétention hydro-sodée qui est la conséquence d’un mauvais fonctionnement de la pompe cardiaque.

2. Symptômes des cardiopathies

Les troubles fonctionnels qui donnent l’alerte sur l’existence d’une maladie cardiaque n’apparaissent souvent que tardivement dans l’évolution de la maladie, après une longue période au cours de laquelle l’affection est «compensée» par divers ajustements circulatoires, nerveux ou humoraux. À ce stade de «maladie silencieuse», ce sont les examens complémentaires qui peuvent mettre en évidence la cardiopathie.

L’importance des symptômes accusés par le patient n’est pas toujours en rapport avec la sévérité de la cardiopathie. Ainsi, des manifestations bruyantes dominées par la sensation de palpitations, d’angoisse, de «manque d’air» peuvent relever d’une simple «névrose cardiaque» sans anomalie structurale cardiaque, dont il conviendra de couper le cercle vicieux anxiogène.

Les douleurs cardiaques sont dominées par l’angine de poitrine. La douleur déclenchée par la marche , notamment au démarrage matinal ou après le repas et par temps froid, siégeant derrière le sternum, à type de serrement, de poids, parfois de brûlures, cédant en une à deux minutes à l’arrêt de la marche (ou de l’effort) est d’emblée évocatrice de l’angine de poitrine «commune» (Heberden), dont le substratum habituel est un rétrécissement significatif (de plus de 75 p. 100) de la lumière d’un ou de plusieurs troncs coronaires principaux. La douleur irradie parfois vers les régions mammaires, les mâchoires, les membres supérieurs et se termine volontiers par une ou deux éructations qui ne doivent pas être prises pour une aérophagie. L’effet de la trinitrine ou d’un médicament équivalent d’absorption rapide, croqué, mis sous la langue ou pulvérisé sur la muqueuse buccale dès le début de la douleur ou de manière préventive avant la marche ou l’effort contribue à assurer le diagnostic, notamment dans les cas litigieux du fait des caractères du symptôme (impression de blocage respiratoire sans douleur vraie) ou de sa localisation (par exemple exclusivement brachiale ou épigastrique ou dorsale). Les douleurs de même type, mais survenant au repos et notamment dans la deuxième partie de la nuit, font discuter le diagnostic d’angine de poitrine spontanée (Prinzmetal) dont le substratum anatomique variable allant de l’absence de lésion coronarienne patente (avec spasme dominant ou exclusif) aux lésions trivasculaires sévères en passant par une sténose proximale d’un seul vaisseau ne pourra être reconnu qu’à la coronarographie. Quand cette dernière est normale et que les tests de provocation du spasme coronarien (cf. infra ) sont négatifs, la tendance actuelle est de rechercher un spasme de l’œsophage.

L’angine de poitrine en dehors de l’athérosclérose coronarienne est très rare et relève essentiellement soit d’un obstacle à l’éjection du ventricule gauche (rétrécissement aortique), soit d’une insuffisance coronarienne fonctionnelle par accès de tachycardie ou anémie sévère.

La dyspnée (essoufflement) n’est pas l’apanage des maladies cardiaques mais constitue souvent le premier symptôme du retentissement sur la circulation pulmonaire d’une maladie de cœur gauche (atteinte de la valve mitrale ou aortique, insuffisance du ventricule gauche par cardiopathie ischémique, hypertension artérielle, maladie primitive du muscle cardiaque). La dyspnée apparaît d’abord et pour une période plus ou moins longue uniquement à l’effort, c’est-à-dire à la course ou à la marche rapide, à la montée des escaliers, au port de poids, puis pour les efforts de plus en plus minimes, tels que le déshabillage, une conversation longue et animée, pour se manifester enfin au repos et notamment dans le decubitus nocturne. Les crises de suffocation d’origine cardiaque se présentent soit comme une dyspnée avec composante broncho-spasmodique (pseudo-asthme cardiaque), soit surtout sous la forme de l’œdème aigu du poumon au cours duquel la dyspnée intense s’accompagne de toux, d’expectoration rosée et d’encombrement du thorax par des râles qui traduisent l’envahissement des alvéoles pulmonaires par le liquide qui a filtré à travers les capillaires pulmonaires, à la suite de la brusque élévation de la pression dans la petite circulation.

Les palpitations peuvent soit être l’expression de l’accélération du rythme cardiaque (tachycardie sinusale), en particulier chez les sujets émotifs non entraînés à l’activité physique, anxieux, soit traduire une anomalie dans l’origine des pulsations cardiaques (cf. infra ). Les battements anormaux épisodiques («faux pas» du cœur, impression d’arrêt suivie ou non de la perception d’une pulsation plus intense, choc dans la poitrine) habituellement mieux perçus dans les phases de repos et le silence ambiant relèvent, dans la règle, d’extrasystoles, dont seul l’électrocardiogramme pourra montrer le point de départ auriculaire ou ventriculaire.

Les crises de tachycardie à début brutal (sensation du déclic intrathoracique) avec emballement très rapide (de 180 à 200 pulsations par minute) et très régulier du cœur caractérisent la tachycardie paroxystique supraventriculaire, dite maladie de Bouveret. La fin de l’accès est généralement brusque, suivie de l’émission d’une grande quantité d’urine claire (polyurie critique). Les crises se répètent à des intervalles variables et, dans bon nombre de cas, il est possible d’éduquer le patient pour qu’il arrête lui-même ses palpitations.

La perception de palpitations rapides et irrégulières évoque l’arythmie complète par fibrillation auriculaire, qui peut se manifester de manière paroxystique ou permanente. Les palpitations font également partie de l’expression fonctionnelle de tachycardies plus rares (flutter, tachycardie ventriculaire).

Les syncopes (pertes de connaissance) ou leurs équivalents mineurs (états présyncopaux ou lipothymies) traduisent le manque d’irrigation transitoire du cerveau par chute brutale du débit dans l’aorte et les artères à destinée encéphalique. Survenant à l’effort, elles évoquent en premier chef un obstacle à l’éjection du ventricule gauche (sténose aortique). Apparaissant au passage en position debout, elles doivent faire rechercher une hypotension artérielle orthostatique. Les syncopes dites à l’emporte-pièce, sans préavis, avec chute et souvent blessures corporelles, de durée brève, sans convulsions, ne laissant aucun souvenir au malade et non suivies de séquelles neurologiques, font immédiatement penser à une syncope par trouble du rythme cardiaque. La plus fréquente concerne le bloc auriculo-ventriculaire (maladie de Stokes-Adams), mais les pertes de connaissance complètes ou les lipothymies peuvent aussi relever d’une défaillance transitoire du nœud sinusal (maladie du sinus) ou d’une crise de tachycardie paroxystique.

La fatigabilité , avec asthénie physique et parfois intellectuelle, est un symptôme commun à de nombreux états pathologiques. Chez un sujet atteint de cardiopathie, elle est volontiers l’expression d’une baisse de débit cardiaque qui diminue le rendement musculaire et ne permet pas une bonne adaptation à l’effort.

3. Examens complémentaires

Exploration radiologique standard

Le cliché thoracique standard (fig. 1) renseigne sur la position du cœur dans le thorax, les dimensions de la silhouette cardio-péricardique et des gros vaisseaux de la base, aorte et artère pulmonaires. La radioscopie, simple ou effectuée sous amplificateur de brillance dans diverses positions (face, profil, obliques), donne des renseignements supérieurs à la radiographie car elle permet d’analyser les battements cardiaques. Les déformations de la silhouette cardiaque peuvent être segmentaires (dilatation d’une ou de plusieurs cavités) ou globales, notamment en cas d’épanchement péricardique. L’examen radiologique peut révéler les calcifications, en particulier valvulaires (aorte et mitrale) et péricardiques (péricardite chronique calcifiée). Il renseigne sur l’état de la circulation pulmonaire: «poumon cardiaque» par surcharge veino-capillaire des cardiopathies gauches, dilatation du tronc et des branches pulmonaires en cas d’hypertension dans la petite circulation ou shunt artérioveineux par cardiopathie congénitale, hypovascularisation segmentaire (embolie pulmonaire) ou diffuse (sténose sur la voie pulmonaire).

Électrocardiogramme

L’électrocardiogramme (ECG) enregistre les variations du potentiel électrique induites par l’activité cardiaque à tous les temps de la révolution cardiaque. Leur transmission à la surface corporelle est captée par des dérivations qui, pour l’électrocardiogramme standard , sont placées à la surface de la peau de manière à effectuer douze enregistrements. Les dérivations bipolaires des membres (D1, D2, D3) enregistrent les variations du potentiel entre les deux bras et la jambe gauche et les dérivations unipolaires des membres (VR, VL, VF), l’activité électrique transmise respectivement au bras droit, au bras gauche et à la jambe. Les dérivations précordiales (de V1 à V6) sont placées de manière conventionnelle entre le bord droit du sternum au quatrième espace intercostal et la région axillaire au sixième espace, de manière à refléter de façon préférentielle l’activité du ventricule droit (V1-V2) et celle du ventricule gauche (V5-V6).

L’électrocardiogramme standard renseigne sur la rythmicité cardiaque, sur l’état de la propagation de la conduction entre oreillette et ventricule et au sein du muscle ventriculaire. Il donne des informations de première importance sur l’activité auriculaire (exprimée par l’onde P) et l’activité ventriculaire avec ses deux composantes, rapide (complexe QRS), ou phase de dépolarisation ventriculaire, et lente (onde T), ou période de repolarisation (fig. 2). L’hypertrophie – dilatation des oreillettes et des ventricules – imprime des modifications très caractéristiques à l’ECG, qui se traduisent par des changements dans l’orientation de l’axe électrique de P et de QRS (dans la direction de la cavité pathologique), une augmentation de voltage des accidents électriques et des modifications dites secondaires de la repolarisation dans les hypertrophies ventriculaires. La dépolarisation ventriculaire (QRS) est altérée par la présence d’un infarctus du myocarde (onde Q large et profonde de nécrose), d’un trouble de conduction intraventriculaire (élargissement de QRS par bloc de branche) ou d’une pré-excitation ventriculaire (onde delta du syndrome de Wolff-Parkinson-White).

La phase de repolarisation ventriculaire (segment ST et onde T) est altérée directement dans de nombreuses conditions: ischémie myocardique au premier chef, mais aussi péricardites, troubles métaboliques divers, influences thérapeutiques (digitaliques, antiarythmiques), accidents vasculaires cérébro-méningés. Il faut savoir que l’onde T peut être modifiée de manière non spécifique, de façon transitoire ou permanente, en l’absence de cardiopathie décelable, notamment en cas de changement de position, en période post-prandiale, pendant la grossesse, chez la femme surtout en période ménopausique et en cas de surpoids, chez les sujets anxieux ou névrosés. D’où la nécessité d’interpréter avec beaucoup de prudence les modifications isolées de la repolarisation et de les intégrer dans leur contexte.

Échocardiographie

Son développement au cours de la dernière décennie a représenté un progrès décisif dans l’étude non invasive des cardiopathies au moyen des ultrasons.

L’échocardiographie TM (time motion ) inscrit en une seule dimension la morphologie des parois, des valves et des cavités cardiaques pendant la révolution cardiaque dans les plans balayés par le faisceau ultrasonique orienté successivement dans plusieurs directions. Les épanchements péricardiques, même de faible abondance et invisibles aux rayons X, sont aisément détectés par cette méthode.

L’échocardiographie bidimensionnelle étudie le cœur dans différentes incidences et fournit des images morphologiques et dynamiques d’une très grande qualité des structures cardiaques et du départ des gros vaisseaux, permettant de sélectionner les malades pour qui le recours à une exploration invasive (cathétérisme) sera nécessaire. Dans les cardiopathies congénitales complexes, l’échocardiographie bidimensionnelle est d’un intérêt majeur, et l’échocardiographie de contraste facilite le diagnostic des shunts intracardiaques. Outre son intérêt morphologique, l’échocardiographie a ouvert de très intéressantes perspectives sur l’évaluation de la contractilité myocardique segmentaire et de la fonction ventriculaire gauche. L’échocardiographie n’apporte aucun renseignement direct sur l’état anatomique des vaisseaux coronariens, à l’exception de la partie initiale du tronc coronaire gauche.

L’échocardiographie Doppler , sur les modes linéaire et pulsé, est en plein développement, et la production d’images en couleurs constitue un nouveau progrès technologique.

L’écho Doppler permet de bien visualiser le fonctionnement valvulaire et devrait permettre de quantifier les sténoses et les fuites, de reconnaître certains shunts intracardiaques et, peut-être, d’évaluer la perméabilité des pontages aortocoronariens.

Autres explorations non invasives

Phonomécanographie

Après avoir connu un essor considérable dans les années 1960, cette technique a perdu beaucoup de son intérêt depuis l’avènement de l’échocardiographie. La phonocardiographie est fondée sur l’enregistrement des vibrations ou oscillations de fréquences diverses, audibles ou non, qui correspondent aux bruits cardiaques normaux ou anormaux et aux souffles pathologiques. Elle confirme et surtout affine les données de l’auscultation et apporte des renseignements complémentaires quant à la chronologie des signes pathologiques dans la révolution cardiaque, en les situant par rapport aux bruits normaux du cœur et à l’activité électrique (fig. 2).

Différents enregistrements mécaniques (mécanogrammes) ont été couplés au phonocardiogramme: choc de la pointe (apexogramme), pouls artériel cervical (carotidogramme), pouls veineux jugulaire (phlébogramme jugulaire). Les méthodes de sensibilisation de l’analyse des phonomécanogrammes faisant appel à différentes manœuvres, comme l’expiration forcée bloquée (dite de Valsalva), et à l’utilisation de substances modifiant le comportement hémodynamique (inhalation de nitrite d’amyle pour faire chuter les résistances périphériques, injection de vasoconstricteurs pour les augmenter) ne sont presque plus utilisées.

Épreuve d’effort

L’ECG enregistré à l’effort a un double intérêt: diagnostique, pour dépister une cardiopathie ischémique (40 p. 100 environ des sujets ayant un angor authentique et des lésions coronariennes significatives à la coronarographie ont un ECG normal au repos), et d’évaluation fonctionnelle, surtout dans le cadre des maladies coronariennes pour en suivre l’évolution, spontanée ou sous traitement ou pendant et après rééducation fonctionnelle.

Les épreuves d’effort doivent être pratiquées selon un protocole parfaitement codifié, sur cycle ergométrique ou tapis roulant, par paliers, sous surveillance médicale avec enregistrement continu de l’ECG dans certaines dérivations sélectionnées et prise régulière de la pression artérielle. Le matériel nécessaire à une éventuelle réanimation et le personnel entraîné à sa réalisation sont indispensables.

En l’absence de symptôme cardiaque (douleur, essoufflement), de variation anormale de la pression artérielle (en excès et surtout en cas de chute), d’épuisement musculaire ou d’anomalie électrocardiographique (décalage marqué du segment ST, apparition de troubles du rythme ou de la conduction) obligeant à l’arrêt, l’épreuve est poursuivie jusqu’à l’obtention d’une fréquence cardiaque maximale, définie par 220 pulsations par minute moins l’âge du patient. La sensibilité de l’épreuve d’effort dans le diagnostic de la maladie coronarienne est élevée (au moins 80 p. 100). Quand l’épreuve est rapidement positive (apparition de douleurs et/ou décalage inférieur de ST 礪 1 mm pour les premiers paliers d’effort) et si le décalage du segment ST est important, les lésions coronariennes sont habituellement multiples et sévères. Il existe cependant des épreuves d’effort faussement positives, en particulier pour le sexe féminin où les modifications de repolarisation sont souvent difficiles à interpréter. Les épreuves d’effort faussement négatives sont rares mais à connaître car, si l’angine de poitrine est cliniquement typique, une épreuve d’effort normale ne saurait écarter le diagnostic.

Enregistrements ambulatoires de longue durée

Échocardiographie dynamique (méthode de Holter)

L’enregistrement prolongé de l’activité électrique du cœur, sur bande magnétique, pendant 24 heures et parfois plus, chez un patient poursuivant son activité coutumière a une place de choix dans le domaine des arythmies cardiaques. La méthode de Holter permet de reconnaître l’arythmie, si elle est suffisamment répétitive, et d’établir une corrélation entre les symptômes éventuellement accusés par le patient en cours d’enregistrement et les données objectives fournies par la lecture de la bande. Le mode de début de certaines arythmies, leur horaire d’apparition, leur relation avec l’activité sinusale de fond sont intéressants à prendre en considération et peuvent orienter vers un mode de déclenchement vagal, catécholergique ou ischémique. Le Holter est un des meilleurs moyens pour apprécier l’effet bénéfique des thérapeutiques antiarythmiques (réduction significative ou suppression d’extrasystoles fréquentes et/ou complexes en particulier) et, dans certains cas, de détecter l’effet pro-arythmique de certaines substances.

L’enregistrement électrique prolongé est également indiqué dans le cadre de l’insuffisance coronarienne, lorsque le diagnostic est douteux, si l’épreuve d’effort est impossible ou non significative, pour dépister une ischémie myocardique silencieuse (c’est-à-dire sans douleur thoracique) chez des sujets à facteurs de risque élevés et, dans certains cas, pour la surveillance du traitement anti-angineux.

Cependant, l’étude de la repolarisation ventriculaire n’est pas toujours facile, compte tenu des variations possibles de celle-ci qu’on observe dans des circonstances physiologiques (cf. supra , ECG). Si le sus-décalage de ST ne prête guère à discussion (angor de Prinzmetal), il n’en est pas toujours de même pour les variations isolées de l’onde T (aplatissement, inversion) et les décalages modérés négatifs du segment ST.

Enregistrement de la tension artérielle

L’enregistrement de la pression artérielle de manière automatique en ambulatoire est une nouvelle approche de l’étude du comportement tensionnel. Il amènera sans doute à reconsidérer le profil tensionnel physiologique, compte tenu des variations nycthémérales liées aux modifications circadiennes du tonus neurovégétatif et des influences humorales qui agissent sur les résistances périphériques, la fréquence cardiaque et la contractilité ventriculaire. Les progrès technologiques en cours pour améliorer l’enregistrement dynamique de la pression artérielle aboutiront sans doute à une plus large diffusion de la méthode qui permettra peut-être d’améliorer les indications et le suivi de la thérapeutique antihypertensive.

Enregistrements par voie œsophagienne

L’œsophage est situé dans le médiastin postérieur et se trouve, pour une partie de son trajet, à la face postérieure du cœur, au voisinage de l’oreillette gauche. Cette proximité a été utilisée pendant longtemps pour faciliter le diagnostic radiologique de la dilatation de l’oreillette gauche par opacification de l’œsophage à l’aide d’une bouillie barytée opaque aux rayons X montrant le refoulement en arrière de l’œsophage, notamment dans les maladies de la valvule mitrale.

Récemment, la stimulation de l’oreillette gauche par voie transœsophagienne à l’aide d’une électrode bipolaire introduite par voie nasale ou buccale a été utilisée à des fins d’exploration électrophysiologique, permettant d’éviter le recours à une exploration invasive de stimulation de l’oreillette par cathétérisme cardiaque. L’écho-Doppler peut même être effectué par voie œsophagienne avec une sonde à ultrasons spéciale pour affiner certaines explorations.

Nouvelle imagerie cardiologique

Exploration isotopique

La scintigraphie myocardique au thallium 201, couplée à une épreuve d’effort, a permis d’améliorer le diagnostic de l’insuffisance coronarienne. Le thallium 201 a une grande affinité pour les fibres musculaires, et le degré de sa fixation permet de reconnaître si l’injection du myocarde est normale ou déficitaire en permanence (infarctus du myocarde) ou de façon transitoire pendant l’effort (insuffisance coronarienne patente ou silencieuse).

La ventriculographie isotopique au technetium réalisée «à l’équilibre», au repos et à l’effort donne des images des cavités cardiaques en systole et diastole et permet d’étudier la fraction d’éjection du ventricule gauche et la contractilité segmentaire pariétale chez des malades où une exploration angiographique (cf. infra ) n’est pas possible ou souhaitable et si l’examen doit être répété.

L’imagerie par résonance magnétique

L’imagerie par résonance magnétique (I.R.M.) en est à ses débuts en cardiologie. Elle paraît prometteuse non pas tant dans les renseignements d’ordre morphologique que pour la source d’informations concernant le métabolisme cardiaque qu’elle est susceptible d’apporter.

Cathétérisme cardiaque

Voies d’abord des cavités cardiaques

L’abord des cavités droites (cathétérisme droit) s’effectue en introduisant une ou plusieurs sondes par une veine périphérique (veine brachiale ou fémorale) par voie percutanée ou après dénudation sous anesthésie locale. Le ou les cathéters, opaques aux rayons X, sont mis en place en suivant leur trajet sous amplificateur de brillance.

L’accès aux cavités gauches (cathétérisme gauche) s’effectue par voie artérielle rétrograde, le cathéter étant introduit soit après dénudation de l’artère humérale, soit par abord percutané de l’artère fémorale. Le cathétérisme des artères coronaires s’effectue sélectivement en introduisant successivement la sonde dans la coronaire droite et la coronaire gauche.

Explorations effectuées

Renseignements d’ordre hémodynamique

Les renseignements d’ordre hémodynamique sont obtenus à partir de la prise des pressions, systolique, diastolique et moyenne, dans les cavités cardiaques et les gros vaisseaux. La pression «capillaire» pulmonaire obtenue par le blocage de la sonde dans les plus petits vaisseaux pulmonaires renseigne sur la pression en aval, dans les veines pulmonaires et l’oreillette gauche. Le calcul des résistances vasculaires pulmonaires (résistance totale et résistance artériolaire) et celui du débit cardiaque (par thermodilution le plus souvent) donnent d’importantes informations.

Communication entre les cavités cardiaques

En cas de communication entre les cavités cardiaques, la sonde peut suivre un trajet anormal en s’engageant à travers une cloison normalement fermée (par exemple, sondage de l’oreillette gauche à travers une communication interauriculaire, de l’aorte à partir de l’artère pulmonaire s’il persiste un canal artériel). Les prélèvements gazométriques étagés depuis la veine cave jusqu’à l’artère pulmonaire permettent le diagnostic de shunt artério-veineux, de son siège et de son importance.

Opacification des cavités cardiaques (angiographie)

L’injection d’un produit iodé opaque aux rayons X dans le cœur droit permet de visualiser la dilatation ou la déformation segmentaire du ventricule droit, de mettre en évidence des shunts droit-gauche (opacification des cavités gauches au temps droit) et de montrer l’état de la circulation pulmonaire (surtout en cas d’embolie pulmonaire).

La ventriculographie gauche par injection de produit de contraste dans le ventricule gauche permet d’apprécier le degré de dilatation de cette cavité, de mettre en évidence un reflux vers l’oreillette gauche (insuffisance mitrale), de calculer la fraction d’éjection (différence entre les volumes télédiastolique et télésystolique), d’évaluer la contractilité du ventricule gauche, qui peut être diminuée de façon globale (myocardiopathie dilatée) ou segmentaire (séquelle d’infarctus du myocarde). L’opacification sélective de l’aorte ascendante permet de reconnaître une régurgitation par l’orifice aortique (insuffisance aortique).

L’opacification sélective des coronaires (coronarographie) effectuée dans diverses incidences est la seule façon d’obtenir une idée précise de l’état des troncs coronariens principaux (réseau épicardique) et constitue le temps indispensable préalable à toute indication de revascularisation du myocarde par pontage aorto-coronarien ou angioplastie transluminale. Quand les artères coronaires sont normales ou peu altérées et qu’il existe une angine de poitrine spontanée faisant suspecter un spasme coronarien, celui-ci peut être mis en évidence après injection d’une substance vasoconstrictive coronarienne, dérivée de l’ergot de seigle (test au Methergin).

Électrophysiologie endocavitaire

L’introduction de sondes équipées d’électrodes au sein des cavités cardiaques permet de mettre en évidence des potentiels électriques invisibles sur les tracés enregistrés à distance (potentiels liés à l’activité du faisceau de His et de ses branches proximales et, avec plus de difficulté, potentiel du nœud sinusal), de suivre l’évolution de l’excitation normale et pathologique (cartographies endocardiques auriculaires et ventriculaires), et de stimuler différentes zones du cœur à des fréquences programmées à partir de stimulateurs externes.

L’enregistrement de l’activité du faisceau de His (potentiel H), effectué aisément en plaçant l’extrémité de la sonde au bord supérieur de la tricuspide à partir d’un cathétérisme veineux percutané fémoral, permet de définir avec précision le siège d’une anomalie de conduction (bloc) entre oreillettes et ventricules. La localisation précise d’une zone génératrice d’impulsions anormales est nécessaire quand le caractère très invalidant de l’arythmie fait envisager une solution radicale (chirurgie, fulguration).

Biopsie myocardique

Limitée par voie endocavitaire au ventricule droit, le biotome étant généralement introduit par la veine jugulaire, la biopsie myocardique apporte parfois des renseignements sur l’étiologie de certaines myocardiopathies (myocardites, infiltration amyloïde, hémosidérose), permet de surveiller la toxicité pour le myocarde de certaines chimiothérapies et représente un moyen essentiel de dépistage des crises de rejet après transplantation cardiaque.

Investigations biologiques

Les investigations biologiques ont une place moins importante que dans d’autres domaines de la médecine, mais elles apportent des renseignements de grand intérêt dans:

– la recherche des facteurs de risque de l’athérosclérose coronarienne: augmentation des fractions athérogènes des lipides sanguins, diabète sucré;

– la contribution au diagnostic de rhumatisme articulaire aigu par la mise en évidence de témoins d’une streptococcie récente (prélèvement de gorge, dosage des anticorps sanguins);

– la découverte par hémoculture du germe responsable d’une greffe bactérienne dans les endocardites infectieuses;

– le diagnostic biologique de l’infarctus du myocarde en phase aiguë par le dosage des enzymes libérées par le muscle cardiaque nécrosé;

– la surveillance des traitements anticoagulants pour en adapter la posologie.

4. Désordres fondamentaux de la fonction cardiaque

Les désordres de la fonction cardiaque se caractérisent par des troubles affectant le «cœur électrique», c’est-à-dire le système générateur des impulsions cardiaques et assurant leur propagation, et le «cœur mécanique», c’est-à-dire la fonction de pompe, dont l’altération conduit à l’insuffisance cardiaque.

Troubles du rythme et de la conduction cardiaque

Arythmies cardiaques

Le rythme cardiaque normal est lié à la décharge régulière d’un pacemaker, le nœud sinusal, situé à la partie supérieure de l’oreillette droite, et dont les impulsions sont de 60 à 80 par minute chez l’adulte, au repos. Le cœur s’accélère normalement lors de l’activité physique, dans les circonstances physiologiques qui exigent un surcroît de demande métabolique, sous l’effet des émotions et de la prise d’excitants tels que café, tabac, alcool. La tachycardie sinusale est un signe souvent révélateur d’un hyperfonctionnement de la glande thyroïde. Elle fait partie des mécanismes compensateurs de la baisse du débit cardiaque qui résulte de l’altération de la contraction ventriculaire.

Les arythmies proprement dites relèvent de l’entrée en jeu d’un «foyer» ectopique qui peut se situer dans n’importe quelle portion du cœur, ou de la formation d’un circuit électrique (appelé réentrée), dont la localisation peut être auriculaire, jonctionnelle (entre oreillettes et ventricules) ou ventriculaire (fig. 3).

L’arythmie extrasystolique est la plus fréquente. Les extrasystoles sont des battements ectopiques, uniques ou répétés, provenant d’un seul ou de plusieurs foyers qui peuvent entraîner des sensations désagréables de ratés, de coups dans la poitrine, d’arrêts de cœur, de palpitations plus ou moins angoissantes, généralement gênantes en période de repos. Les extrasystoles ne constituent habituellement pas en elles-mêmes un facteur de gravité, leur pronostic dépend de l’état cardiaque qui peut être absolument normal (extrasystoles dites bénignes) ou pathologique. L’engagement d’un traitement antiarythmique n’est légitime que si l’extrasystole est trop mal vécue ou s’il existe des signes de cardiopathie permettant de craindre que l’extrasystolie évoluera vers une arythmie plus sévère.

La fibrillation auriculaire (FA) vient après l’arythmie extrasystolique par ordre de fréquence, et celle-ci augmente régulièrement avec l’âge. Elle peut être la conséquence de la dilatation auriculaire (maladie de la valve mitrale surtout), dépendre d’un facteur extracardiaque (hyperthyroïdie de l’adulte) ou être solitaire. Chez le sujet âgé indemne de cardiopathie apparente, elle laisse suspecter un état dégénératif non ischémique du tissu auriculaire. La FA consiste en une désorganisation totale de l’activité électrique auriculaire avec perte de la contraction mécanique rythmée des oreillettes. Les oreillettes sont parcourues de multiples ondes électriques, qui se propagent de façon anarchique à une très grande vitesse, supérieure à 350 par minute. Les ondes auriculaires de fibrillation (f ) sont en grande partie bloquées dans le nœud auriculo-ventriculaire qui joue le rôle de filtre, protégeant les ventricules d’une activité trop rapide. La contraction ventriculaire est irrégulière, aboutissant à l’arythmie complète perçue à l’auscultation et à la prise du pouls du patient. L’arythmie complète par fibrillation auriculaire peut être paroxystique, survenant par accès plus ou moins rapprochés ou évoluer sur un mode permanent. La FA chronique non traitée entraîne une insuffisance cardiaque dans des délais variables d’autant plus courts que la fréquence ventriculaire est élevée et qu’il existe une altération préalable des ventricules. Les digitaliques permettent de ralentir la fréquence ventriculaire. Le choc électrique externe est le moyen le plus efficace pour rétablir le rythme sinusal. Les antiarythmiques sont prescrits dans le but de prévenir les rechutes.

Dans le flutter auriculaire , les oreillettes battent au rythme très rapide et régulier de 300 contractions par minute, entretenu par une onde qui se propage en un mouvement circulaire dans la paroi auriculaire (ondes F). Les excitations sont bloquées une fois sur deux dans le nœud auriculo-ventriculaire, ce qui entraîne un rythme ventriculaire à 150 par minute. Le passage à la chronicité du flutter conduit à l’insuffisance cardiaque, d’où la nécessité de supprimer cette arythmie, ce qui est obtenu facilement par un procédé électrique (stimulation par voie œsophagienne ou endocavitaire ou choc électrique externe).

Les tachycardies paroxystiques supraventriculaires (maladie de Bouveret) correspondent à un mécanisme de réentrée qui peut soit être localisé à l’intérieur du nœud auriculo-ventriculaire (réentrée nodale), soit couvrir un large circuit empruntant dans un sens la voie de conduction normale (nœud AV et faisceau de His) et dans l’autre une voie accessoire de conduction AV, appelée faisceau de Kent. La tachycardie est rapide (entre 180 et 220 pulsations par minute) parfaitement régulière, à début et fin brusques. Les complexes QRS sont normaux et l’activité auriculaire se superpose à ces derniers ou les suit. L’excitation du nerf pneumogastrique obtenue notamment par la compression de la région sinocarotidienne peut entraîner l’arrêt brusque de la crise. Les accès se répètent à des intervalles variables, mais l’évolution reste dans la règle bénigne car il n’existe pas, sauf association occasionnelle, d’anomalie de structure des valves, du muscle cardiaque ou de la circulation coronarienne. Le tracé ECG en rythme sinusal peut être modifié de façon caractéristique par un syndrome de Wolff-Parkinson-White (PQ court et onde delta), qui traduit la présence d’une voie de conduction anormale auriculo-ventriculaire. Les rares formes invalidantes de tachycardies paroxystiques supraventriculaires compliquant un syndrome de Wolff-Parkinson-White, surtout si elles sont associées à des accès de fibrillation auriculaire avec réponse ventriculaire très rapide, justifient la section chirurgicale du faisceau de Kent.

Les tachycardies ventriculaires représentent les arythmies les plus graves, car elles compliquent dans la règle une cardiopathie sévère (d’origine coronarienne dans 80 p. 100 des cas, myocardiopathie, dysplasie du ventricule droit), compromettent souvent l’hémodynamique et peuvent dégénérer en fibrillation ventriculaire mortelle. La fréquence cardiaque est souvent moins élevée que dans les tachycardies d’origine supraventriculaire, les complexes QRS sont toujours élargis et le diagnostic, pas toujours aisé, peut nécessiter le recours à des investigations plus poussées, comme l’enregistrement électrique par voie œsophagienne ou endocavitaire. L’accès de tachycardie ventriculaire persistante est une urgence médicale, l’arrêt de la crise pouvant être obtenu par injection intraveineuse d’un antiarythmique si le malade n’est pas en grande insuffisance cardio-circulatoire et en toute sécurité par choc électrique externe. Quand les récidives de tachycardie ne sont pas prévenues par la médication antiarythmique, le recours à des méthodes non pharmacologiques est légitime: exérèse chirurgicale de la zone arythmogène, fulguration endocavitaire, défibrillateur-cardioverter implantable.

Les torsades de pointe sont des arythmies ventriculaires bien particulières par leur morphologie électrique (changement progressif d’aspect des complexes QRS élargis), leurs circonstances de survenue (hypokaliémie, grandes bradycardies, médicaments cardiologiques et non cardiologiques allongeant l’intervalle QT, formes congénitales et familiales d’anomalies de la repolarisation ventriculaire associées ou non à une surdité), leur évolution par crises souvent génératrices de syncopes, le risque de transformation en fibrillation ventriculaire irréversible. Le traitement des torsades de pointe est très différent de celui des autres arythmies ventriculaires. Il consiste à reconnaître et à supprimer le facteur causal, à corriger une éventuelle déplétion en potassium, à administrer du magnésium par voie veineuse, à accélérer la fréquence cardiaque par stimulation endocavitaire dans certains cas.

La fibrillation ventriculaire est la cause principale de mort subite. Elle peut apparaître d’emblée, comme manifestation d’instabilité électrique, dans les premières minutes ou heures d’un infarctus du myocarde aigu ou succéder à une autre arythmie ventriculaire chez les malades ayant une cardiopathie sévère. Les contractions complètement anarchiques des ventricules aboutissent très rapidement à une inefficacité cardio-circulatoire qui est mortelle en l’absence de mise en train de manœuvres de réanimation (massage cardiaque, ventilation assistée, choc électrique externe). Ces dernières doivent être entreprises en quelques minutes pour éviter les complications cérébrales secondaires à une anoxie prolongée.

Troubles de la conduction cardiaque

La propagation de l’influx nerveux peut être allongée ou interrompue sur l’une des parties qui constituent le tissu spécifique de conduction cardiaque, nœud auriculo-ventriculaire, tronc du faisceau de His, branches droite et gauche du faisceau de His.

Les troubles isolés de la conduction intraventriculaire (blocs de branche ) ne gênent pas la mécanique cardiaque et se traduisent par des modifications caractéristiques de l’ECG qui permettent de reconnaître si la conduction est altérée dans la branche droite du faisceau de His, la branche gauche ou les rameaux de division antérieurs et postérieurs de cette dernière (fig. 4).

Les anomalies de la conduction auriculo-ventriculaire correspondent aux blocs auriculo-ventriculaires pour lesquels on distingue trois degrés. Le premier degré est la simple prolongation du temps de conduction AV (allongement de l’espace PR au-delà de 0,20 s sur l’ECG). Le deuxième degré est caractérisé par la rupture intermittente de la transmission AV, qui peut survenir après un allongement progressif de la conduction, ou de façon épisodique ou de manière rythmée, par exemple une fois sur deux. Le bloc AV du troisième degré est le reflet de l’interruption totale, transitoire ou permanente, de la conduction entre oreillettes et ventricules; la sauvegarde de la contraction ventriculaire est assurée par l’entrée en jeu de pacemakers subsidiaires (ou de remplacement, normalement dominés par le rythme sinusal) qui assurent un rythme appelé idioventriculaire, de fréquence lente, voisine de 40 pulsations par minute ou moins, et régulière.

La topographie des blocs AV (nœud AV, tronc du faisceau de His ou atteinte simultanée des deux branches du faisceau de His) peut être suspectée sur l’ECG de surface (complexes QRS fins ou élargis), le comportement du bloc à l’activité ou sous épreuve pharmacologique (atropine), mais ne peut être affirmée que par l’enregistrement direct de l’activité du faisceau de His par voie endocavitaire.

Quand le bloc AV n’est pas permanent mais paroxystique (récupération spontanée du rythme sinusal dans l’intervalle des syncopes), l’exploration endocavitaire peut être complétée par des tests dynamiques destinés à montrer la fragilité de la conduction AV (stimulation auriculaire à fréquence rapide, test pharmacologique à l’ajmaline ou la procaïnamide).

Les perturbations de la conduction AV et intraventriculaire peuvent s’observer dans toutes les cardiopathies qui lèsent le tissu de conduction, par ischémie (infarctus aigu du myocarde), myocardites aiguës, myocardiopathies chroniques primitives et secondaires, extension au septum de lésions infectées ou calcifiées de l’orifice aortique, chirurgie de la cloison interventriculaire. Elles sont parfois congénitales, le bloc AV étant le plus souvent complet, par malformation de la région du nœud AV. Mais le plus souvent les troubles conductifs acquis de l’adulte sont solitaires et liés à la dégénérescence élective et progressive du tissu spécifique, qui est plus fréquente sur les branches droite et gauche du faisceau de His (maladie de Lenègre) que sur le tronc commun et le nœud AV.

Les accidents syncopaux et la mort subite auxquels exposent certains blocs AV (maladie de Stokes-Adams) ainsi que l’insuffisance cardiaque par bradycardie excessive sont actuellement prévenus par la mise en place de stimulateurs intracorporels (pacemakers). Ces derniers comprennent une source d’énergie (actuellement assurée par des piles au lithium) et un système électronique, plus ou moins complexe selon le type d’appareil implanté en fonction de l’indication, contenus dans un boîtier mis sous la peau de la région pectorale. Le boîtier est relié à des fils ou électrodes unipolaires ou bipolaires qui, dans plus de 90 p. 100 des cas, sont placés par voie veineuse dans la cavité du ventricule droit. Les progrès considérables de l’électronique médicale permettent de régler différentes fonctions du stimulateur pour adapter la décharge du pacemaker à l’état du malade, en se rapprochant le plus possible des conditions physiologiques.

L’insuffisance cardiaque (IC)

Elle est définie par l’incapacité du cœur à maintenir un débit cardiaque (volume d’éjection systolique 憐 fréquence cardiaque) suffisant, d’abord à l’activité, puis au repos. L’insuffisance cardiaque (asystolie) est la conséquence de la surcharge des cavités par un obstacle à l’évacuation (sténoses valvulaires), une augmentation de la résistance vasculaire (hypertension dans la grande ou la petite circulation), une augmentation de volume sanguin (communication intercavitaire) ou une atteinte de la contractilité myocardique par déficit circulatoire coronarien ou lésion directe du muscle cardiaque (myocardiopathies). Les insuffisances de remplissage ventriculaire sont représentées à l’état pur (adiastolies) par les syndromes de cardio-compression d’origine péricardique (tamponnade cardiaque des péricardites liquidiennes sous tension et péricardites chroniques constrictives) et plus rarement par des troubles de la distensibilité ventriculaire (compliance) secondaires à l’atteinte du muscle ventriculaire et par le raccourcissement excessif des diastoles dans les grandes tachycardies.

Le cœur peut s’adapter plus ou moins longtemps aux conditions hémodynamiques nouvelles que crée une cardiopathie: accélération de fréquence cardiaque, hypertrophie-dilatation cavitaire, mécanismes régulateurs tendant à modifier les circulations régionales au profit du cœur et du cerveau, ajustements neuro-endocriniens et modifications de l’état rénal. Cette période constitue la phase de compensation. Quand les mécanismes d’adaptation sont débordés, la décompensation se traduit par des signes d’insuffisance cardiaque confirmée.

La défaillance du cœur s’exprime par des signes cardiaques (tachycardie, bruit de galop, souffles fonctionnels par dilatation des anneaux auriculo-ventriculaires, augmentation de volume d’une ou de plusieurs cavités aux rayons X et à l’échocardiographie) et des signes périphériques qui traduisent le retentissement en amont de l’élévation des pressions de remplissage. L’hypertension et la stase veino-capillaire pulmonaire dans les cardiopathies «gauches» (affections mitrales, maladies de l’orifice aortique, cardiopathies ischémiques et d’origine hypertensive, myocardiopathies diverses) sont responsables de la dyspnée, des crises d’étouffement paroxystiques, de certaines hémoptysies, de pleurésies d’origine cardiaque.

Le retentissement d’amont des cardiopathies «droites» (hypertension pulmonaire des broncho-pneumopathies chroniques ou d’origine embolique, cardiopathies congénitales avec obstacle pulmonaire ou gros shunt gauche-droit, maladies de l’orifice tricuspidien) s’exprime par la dilatation des veines jugulaires (hypertension dans le territoire de la veine cave supérieure), l’augmentation douloureuse du foie (hypertension dans les veines sus-hépatiques), les œdèmes des membres inférieurs, l’oligurie et les signes d’atteinte rénale fonctionnelle (hypertension cave inférieure).

L’insuffisance cardiaque peut être globale d’emblée ou après une période de défaillance gauche ayant entraîné une hypertension pulmonaire rétrograde sévère.

Quand l’IC évolue lentement, sur des mois ou des années, elle est dite chronique. Une insuffisance cardiaque peut se développer brusquement (IC aiguë) en quelques heures ou en quelques jours dans certaines circonstances telles qu’une embolie pulmonaire massive, un infarctus du myocarde étendu ou compliqué (perforation du septum ventriculaire, grosse fuite mitrale), une très grande tachycardie ou une tamponnade cardiaque (péricardite liquidienne compressive). À l’extrême, le malade est en état de «choc cardiogénique», lié à la chute brutale du débit cardiaque: effondrement tensionnel, collapsus cardiovasculaire avec pâleur, sueurs, refroidissement des extrémités, grand malaise avec obnubilation, oligo-anurie.

Le traitement de l’insuffisance cardiaque s’adresse chaque fois qu’il est possible à sa cause: traitement médical ou électrique d’un trouble du rythme, correction d’une hyperthyroïdie responsable d’une «cardiothyréose», thrombolyse d’une embolie pulmonaire massive, cure chirurgicale d’une cardiopathie valvulaire ou congénitale, exérèse d’un anévrysme ventriculaire post-infarctus, etc. Le traitement palliatif, en attente d’une solution radicale ou souvent seul possible, comprend le repos, la suppression des apports en sel, les digitaliques (essentiels chez les sujets en tachyarythmie complète par fibrillation auriculaire, plus discutés si le rythme est sinusal) et les diurétiques pour favoriser l’élimination du sel et diminuer le volume sanguin circulant. Des progrès récents dans le traitement de l’insuffisance cardiaque ont été réalisés grâce à l’utilisation de substances inotropes non digitaliques dans les formes aiguës sévères d’IC ou les poussées d’IC chronique et, pour les traitements au long cours, par la prescription de vasodilatateurs (dérivés nitrés, inhibiteurs de l’enzyme de conversion).

L’insuffisance cardiaque rebelle aux traitements médicaux, inaccessible à une thérapeutique étiologique, en particulier chirurgicale, est actuellement une indication à une transplantation cardiaque si l’âge du sujet et son état viscéral après bilan s’y prêtent. Les chances de survie à un an (voisines de 75 p. 100) et à cinq ans (supérieures à 55 p. 100) obtenues avec le traitement immuno-suppresseur, et notamment la cyclosporine, ne font plus considérer l’indication d’une transplantation cardiaque comme exceptionnelle. Le cœur artificiel implantable n’en est encore qu’au début de ses applications chez l’homme.

5. Principales cardiopathies

Au cours des vingt dernières années, marquées par de fantastiques progrès diagnostiques et thérapeutiques, la pathologie coronaire a pris de plus en plus d’importance alors que tendait à disparaître progressivement la pathologie dite rhumatismale.

Cardiopathies congénitales

Ces maladies sont dues à un défaut du développement cardiaque, au cours de la vie in utero. Leur gravité varie depuis la bénignité totale – c’est le cas des formes mineures – jusqu’à la mort in utero pour les formes complexes. Il en existe plusieurs sortes.

Les communications anormales

Lorsqu’elles relient les cavités cardiaques droites assurant la circulation pulmonaire et les cavités gauches assurant la circulation systémique, ces communications permettent au sang de passer directement de l’un à l’autre des circuits circulatoires, ce qui réalise un shunt droit-gauche ou gauche-droit selon les types de cardiopathies.

Shunt gauche-droit

Le passage du sang se fait logiquement de la cavité où les pressions sont les plus fortes (c’est-à-dire à gauche) vers celles où elles sont les plus faibles (c’est-à-dire à droite).

– La communication interauriculaire en est une cause. Il s’agit d’une anomalie très fréquente (environ 1 personne sur 5 000), atteignant plus volontiers la femme. À l’auscultation, on perçoit un souffle systolique dû à l’augmentation du débit dans le cœur droit ainsi qu’un dédoublement fixe du deuxième bruit du cœur. L’électrocardiogramme montre une activation anormale du ventricule droit vue aux rayons X, les artères pulmonaires sont battantes, expansives, traduisant l’augmentation du débit pulmonaire. L’échocardiogramme avec doppler précise l’anomalie et estime l’importance du shunt gauche-droit.

– La communication interventriculaire est la malformation congénitale la plus fréquente, encore plus fréquente que la communication interauriculaire. À l’auscultation, on découvre un souffle systolique «en rayons de roue», souvent intense. L’échocardiogramme précise ici encore l’importance du shunt gauche-droit, et du retentissement sur les cavités cardiaques. Quand elles sont isolées, ces deux maladies sont, en règle, bien supportées et bénignes.

– La persistance du canal artériel est également responsable d’un shunt gauche-droit. Le canal artériel fait communiquer l’artère pulmonaire et l’aorte. Son existence est normale chez le fœtus car il n’y a pas de circulation pulmonaire fonctionnelle (cf. vie fœtale). À la naissance, ce canal disparaît progressivement. Dans certains cas, toutefois, il persiste, et une communication anormale s’établit alors entre les deux artères.

– La complication commune à ces shunts gauche-droit provient de l’augmentation chronique des pressions pulmonaires, qui soumet l’arbre artériel à un traumatisme hémodynamique, le détériorant progressivement, ce qui peut entraîner une hypertension artérielle pulmonaire irréversible même après la correction de l’anomalie causale. Dans ces cas de shunts gauche-droit importants, avec retentissement sur le cœur et les poumons, on peut observer des symptômes de mauvaise tolérance: essoufflement, retard du développement de l’enfant.

Shunt droit-gauche

Dans cette éventualité, il existe encore une communication entre les cavités, mais, à la faveur d’anomalies associées ou d’évolution particulière, le sang passe des cavités droites vers les cavités gauches. Cela court-circuite donc le poumon, et le sang se trouve globalement appauvri en oxygène et enrichi en gaz carbonique. Cela explique la cyanose de ces patients et l’expression «maladie bleue» autrefois employée pour décrire cette affection. Cela explique le retard staturo-pondéral fréquemment observé ainsi que la polyglobulie réactionnelle.

– La tétralogie de Fallot est la plus fréquente de ces maladies cyanogènes. Elle associe un rétrécissement de l’infundibulum pulmonaire (c’est-à-dire du chenal situé dans le ventricule droit, conduisant vers l’orifice valvulaire pulmonaire), une hypertrophie du ventricule droit, une communication interventriculaire et une position de l’aorte dite «à cheval», qui lui fait recevoir le sang provenant à la fois des deux ventricules.

– La trilogie de Fallot réalise l’association d’un rétrécissement de l’artère pulmonaire induisant une hypertrophie du ventricule droit et une communication interauriculaire. L’obstacle à l’éjection pulmonaire augmente la pression dans les cavités droites et explique le passage du sang de droite à gauche.

Sténoses congénitales

Certaines portions artérielles, par défaut de développement in utero, peuvent être le siège de rétrécissement:

– La coarctation de l’aorte réalise une sténose de l’isthme de l’aorte juste après le départ de l’artère sous-clavière gauche. Elle est responsable d’une hypertension artérielle, qui peut être révélatrice de la maladie, et d’une diminution des pouls en aval de la sténose. Cette anomalie est souvent associée à des anévrysmes cérébraux. L’examen clinique retrouve un souffle systolique, entendu en particulier dans le dos, et l’absence ou la diminution des pouls fémoraux, chez un sujet hypertendu. Aux rayons X, la silhouette cardiaque prend un aspect dit en cheminée, et on observe des érosions costales causées par les grosses artères intercostales soumises à l’augmentation des pressions en amont de la sténose.

– Les sténoses de la valve pulmonaire et de la valve mitrale sont également possibles, mais le plus souvent elles sont associées à d’autres malformations.

Traitement

Le traitement de ces cardiopathies congénitales n’est pas stéréotypé: il est à discuter cas par cas. Le plus souvent, il est chirurgical quand cela est possible. Le type de l’intervention est décidé au terme d’un bilan hémodynamique et angiographique. Le moment de l’intervention est lui aussi mûrement calculé de façon à réaliser un compromis entre la tolérance et la réversibilité de l’anomalie et la croissance des structures anatomiques sur lesquelles le chirurgien intervient.

Cardiopathies valvulaires

L’anomalie d’une ou de plusieurs valves cardiaques est responsable d’un fonctionnement anormal du cœur, dont l’état risque ainsi de se détériorer progressivement. On distingue deux types d’anomalies valvulaires qui s’associent de façon variable selon la maladie:

– Le rétrécissement de l’orifice valvulaire ou sténose qui gêne le passage du sang et constitue un obstacle hémodynamique plus ou moins sévère selon l’atteinte. Les conséquences en sont un passage moindre du sang dans les cavités d’aval et une réaction d’hypertrophie et de dilatation dans la cavité d’amont.

– L’insuffisance résulte d’un manque d’étanchéité de la valve en position de fermeture: le sang peut alors repasser vers la cavité d’amont. Cette fuite est responsable d’un surcroît de travail du cœur qui doit à la longue fournir le sang nécessaire à la bonne circulation, mais également celui qui revient, de façon anormale, du fait de l’insuffisance valvulaire.

Classiquement, la cause la plus fréquente des valvulopathies est le rhumatisme articulaire aigu. Il s’agit d’une maladie faisant suite à une infection à streptocoques hémolytiques (en général une angine non traitée immédiatement par la pénicilline). Ce rhumatisme articulaire aigu peut, au bout de quelques années, aboutir à des lésions des valvules responsables de rétrécissement et d’insuffisance valvulaire.

Cette étiologie tend à disparaître, en particulier en France, grâce à un meilleur traitement des maladies streptococciques et par là même du rhumatisme articulaire aigu, lequel devient ainsi de plus en plus rare maintenant.

Le rétrécissement mitral

Il touche essentiellement la femme jeune. Le ventricule gauche est mal rempli et l’oreillette gauche en amont se dilate en même temps que les pressions dans l’artère pulmonaire s’élèvent. La patiente se plaint de dyspnée, de toux à l’effort. À un stade avancé, la symptomatologie est présente au repos, et l’œdème pulmonaire est possible.

À l’auscultation, on perçoit un éclat du premier bruit correspondant à la fermeture de la valve mitrale, un claquement d’ouverture de la mitrale juste après le deuxième bruit et un roulement diastolique correspondant au bruit que fait le sang en passant avec difficulté à travers la valve mitrale rétrécie.

Les complications essentielles sont de deux ordres: hémodynamiques, car la sténose retentissant de plus en plus sur la circulation pulmonaire induit une défaillance progressive du cœur droit; rythmiques, car, par distension de l’oreillette gauche, des troubles du rythme auriculaire peuvent apparaître (fibrillation auriculaire en particulier), parfois mal tolérées. De plus, en raison de ces anomalies du rythme, dans une oreillette dilatée, le sang peut coaguler et déterminer ainsi des caillots susceptibles d’emboliser dans la grande circulation. Cela peut être cause d’accident vasculaire cérébral ou d’ischémie aiguë d’un membre, d’où l’importance du traitement anticoagulant chez les patients à risques.

Le traitement consiste en l’ouverture des commissures, ou commissurotomie , de la valve mitrale. Elle peut se faire chirurgicalement: à cœur fermé, le chirurgien introduisant son doigt ou un dilatateur à travers l’auricule gauche, sans ouvrir les cavités cardiaques. Le plus souvent, l’intervention se déroule à cœur ouvert, sous circulation extracorporelle, le chirurgien pouvant alors visualiser les lésions et opérer une dissection fine de cet orifice dans les meilleures conditions [cf. C×UR - Chirurgie cardiaque].

L’angioplastie mitrale est une technique très récente permettant la commissurotomie sans intervention chirurgicale. Cette procédure se déroule au cours d’un cathétérisme où une sonde munie d’un ballon gonflable est introduite par une veine jusque dans l’oreillette droite puis l’oreillette gauche en traversant le septum interauriculaire (cathétérisme transeptal; fig. 5). La sonde est ensuite positionnée à cheval sur la valve mitrale où le ballon est gonflé sous une forte pression. Ce ballon remplace en quelque sorte le doigt ou le dilatateur du chirurgien: la procédure reste tout aussi aveugle, mais les résultats encore restreints de cette technique nouvelle sont très prometteurs.

Parfois, en particulier lorsqu’une insuffisance mitrale est associée, il n’est pas possible de conserver la valve native et il faut mettre en place chirurgicalement une valve artificielle, sous circulation extracorporelle.

L’insuffisance mitrale

L’insuffisance mitrale est responsable d’une fuite de sang depuis le ventricule gauche vers l’oreillette gauche. Cela induit une surcharge de travail pour le ventricule gauche obligé à une éjection systolique plus importante pour compenser le volume régurgitant. L’oreillette gauche se dilate par suite de l’augmentation du volume sanguin qu’elle renferme.

Parmi les causes d’insuffisance mitrale: le rhumatisme articulaire aigu et le prolapsus valvulaire mitral. Dans cette dernière affection, extrêmement répandue, l’appareil sous-valvulaire, ici plus distensible, laisse la valve se fermer un peu plus loin dans l’oreillette gauche. Dans certains cas, cela peut donner lieu à une insuffisance mitrale.

La dyspnée d’effort d’insuffisance cardiaque apparaît progressivement. L’auscultation perçoit un souffle systolique traduisant le passage anormal et contrarié du sang depuis le ventricule gauche jusqu’à l’oreillette gauche: ces deux cavités se dilatent progressivement comme le montrent bien les radiographies. L’électrocardiogramme objective l’hypertrophie de l’oreillette et du ventricule gauches; il enregistre parfois un trouble du rythme auriculaire. L’échocardiogramme avec doppler précise l’importance de la fuite mitrale et du retentissement sur les cavités gauches. Les complications sont l’insuffisance cardiaque, les troubles du rythme auriculaire et les embolies périphériques qu’ils peuvent déterminer. Le traitement consiste en une réparation chirurgicale de la valve, autrement dit valvuloplastie , lorsque cela est possible. Sinon, il faut procéder au remplacement de la valve par une valve artificielle, sous circulation extracorporelle.

Le rétrécissement aortique

Le rétrécissement aortique constitue un obstacle à l’éjection du ventricule gauche dont le sang ne peut passer librement au cours de la systole du ventricule gauche vers l’aorte. Lorsqu’il est très important (très «serré»), ce rétrécissement peut donner lieu à de l’angine de poitrine ou à des syncopes d’effort.

À l’auscultation, on entend un souffle systolique râpeux qui est dû au frottement du sang pour passer à travers l’orifice rétréci. L’électrocardiogramme traduit une hypertrophie du ventricule gauche. Aux rayons X, le cœur reste longtemps de volume normal. L’échocardiogramme avec doppler précise l’importance du rétrécissement ainsi que le retentissement sur le ventricule gauche. Le traitement est chirurgical: il consiste à remplacer cet orifice par une valve artificielle sous circulation extracorporelle.

Récemment est apparue l’angioplastie aortique qui permet à certains patients judicieusement choisis d’éviter la chirurgie. Cette procédure consiste à introduire par une artère fémorale, de façon rétrograde, une sonde munie d’un ballon gonflable que l’on positionne à cheval sur la valve aortique. Le ballon est gonflé sous une forte pression de façon à ouvrir au maximum l’orifice aortique. Des récidives sont possibles avec cette méthode récente, et des études sont encore nécessaires pour mieux en préciser sa place dans le traitement du rétrécissement aortique.

L’insuffisance aortique

L’insuffisance aortique entraîne une fuite, en diastole, du sang provenant de l’aorte vers le ventricule gauche. Il s’ensuit un surcroît de travail pour le ventricule qui doit à chaque systole éjecter à la fois le sang nécessaire à l’organisme mais aussi celui qui est régurgité. Cette affection est longtemps bien supportée et, lorsque les symptômes apparaissent (dyspnée, insuffisance cardiaque), il est souvent trop tard car le ventricule gauche est alors altéré de façon irréversible. Aussi, la surveillance cardiologique est-elle particulièrement importante chez ces patients.

L’auscultation perçoit un souffle diastolique dû à la régurgitation aortique. La tension artérielle minimale ou diastolique tend à diminuer: en effet, elle reflète la pression résiduelle dans les artères entre deux éjections, mais, du fait de la fuite du sang dans la diastole, cette pression diminue. L’électrocardiogramme objective des signes de surcharge du ventricule gauche. À la radiographie thoracique, le ventricule gauche est augmenté de volume. L’échocardiogramme avec doppler tient une place très conséquente, à la fois pour préciser l’importance de la fuite aortique et pour apprécier le retentissement sur le ventricule gauche qui tend à se dilater, et permet de suivre l’évolution de ces patients asymptomatiques. Le traitement consiste en une chirurgie de remplacement des valvules aortiques par une prothèse artificielle, sous circulation extracorporelle.

L’insuffisance tricuspide

Elle est l’atteinte la plus fréquente des valves du cœur droit. Elle est souvent la conséquence d’une atteinte du cœur gauche ou de la circulation pulmonaire et elle est souvent due à la dilatation du ventricule droit: on dit alors qu’elle est fonctionnelle, par opposition à l’insuffisance tricuspidienne organique secondaire, par exemple, à une atteinte rhumatismale. Elle se caractérise à l’auscultation par un souffle systolique qui augmente à l’inspiration profonde (ce qui augmente le débit dans le cœur droit).

Le traitement chirurgical de cette seule anomalie est exceptionnellement nécessaire. Mais, si le chirurgien est obligé d’intervenir sur une autre valve, il peut, à cette occasion, rétrécir artificiellement l’anneau tricuspide (annuloplastie) pour faire disparaître la fuite.

Infections valvulaires

Il s’agit d’endocardite , prenant naissance presque toujours sur une valve déjà pathologique, siège d’une fuite, bien souvent.

À l’occasion d’une septicémie, le germe responsable (souvent un streptocoque) vient se greffer sur la valve, aortique par exemple, pour déterminer des lésions qui vont aboutir à une insuffisance aortique dont l’évolution est souvent sévère. La porte d’entrée la plus fréquemment retrouvée est la dent. C’est dire l’importance pour les patients valvulaires d’une surveillance rigoureuse de l’état dentaire et l’absolue nécessité d’encadrer tous soins dentaires, source de bactériémie, d’une antibiothérapie préventive. D’une façon plus générale, tous les foyers infectieux potentiels ou avérés doivent être rigoureusement éradiqués chez le valvulaire, sous antibiothérapie.

Le traitement curatif de l’endocardite réside en une antibiothérapie prolongée par voie veineuse. Il est souvent nécessaire, après contrôle du processus infectieux, d’opérer le patient (remplacement valvulaire).

Cardiopathies ischémiques

On désigne sous le nom de cardiopathies ischémiques les maladies du cœur à un défaut d’apport sanguin par les artères coronaires. Trois phénomènes concourent à diminuer le débit des artères coronaires:

– La maladie athéromateuse est responsable de dépôts d’athéromes à l’intérieur des artères coronaires. Elle peut aboutir à des rétrécissements du calibre interne de l’artère et déterminer des sténoses coronaires. C’est la première cause d’insuffisance coronaire après cinquante ans. Elle est responsable de l’ischémie myocardique d’effort, par le déséquilibre qui survient lorsque la demande en oxygène – ou du fait de l’effort – devient supérieure à l’apport du fait des rétrécissements artériels qui diminuent le flux coronaire.

– Le spasme coronaire est une réduction transitoire du calibre de l’artère par contraction anormale de la musculature lisse de la coronaire. Il est responsable d’une ischémie myocardique de repos: la demande en oxygène n’est ici pas augmentée, mais l’apport sanguin chute transitoirement du fait de ce spasme.

– La thrombose coronaire voit au fil des années sa responsabilité croître, en particulier dans l’ischémie aiguë et prolongée. Elle sous-tend une partie importante des nouvelles méthodes thérapeutiques.

Schématiquement, on distingue trois types d’ischémie coronaire: l’angor stable, que l’on peut assimiler à l’insuffisance coronaire chronique; l’infarctus du myocarde, qui réalise une insuffisance coronaire aiguë; et un tableau intermédiaire particulièrement important à connaître: l’angor instable, encore appelé syndrome de menace.

L’angor stable

La forme clinique de l’angor stable répond le plus souvent à la maladie athéromateuse qui détermine une ou plusieurs sténoses sur l’arbre artériel coronaire. Les crises douloureuses sont dues à des ischémies coronaires brèves sans conséquence durable sur le myocarde. Elles touchent plus souvent l’homme que la femme, surtout épargnée jusqu’à la ménopause mais chez laquelle le risque d’angor va progressivement devenir équivalent à celui du sexe masculin.

Il s’agit d’une douleur survenant à l’effort et notamment à la marche rapide en côte, par temps froid, contre le vent, décrite comme une barre horizontale derrière le sternum. Cette douleur est constrictive: comparée à un serrement «comme si on appuyait sur la poitrine». Elle irradie souvent la mâchoire inférieure et les deux bras. Elle cède deux à trois minutes après l’arrêt de l’effort.

L’électrocardiogramme peut être normal en dehors des crises. Par contre, il montre, en cours de douleurs, des anomalies très typiques traduisant la souffrance ischémique du myocarde intéressé.

Il est souvent utile de pratiquer une épreuve d’effort qui permet d’étudier divers paramètres, au cours d’un effort progressivement croissant: apparition de la douleur, fréquence cardiaque, tension artérielle et surtout modification de l’électrocardiogramme. Il est maintenant possible de coupler cet examen à une étude de la fixation du thallium 201 (scintigraphie myocardique). Injecté par voie veineuse, ce marqueur de la cellule myocardique est distribué au myocarde selon la distribution coronaire. Il est ainsi possible de démasquer à l’effort des zones moins bien perfusées du fait de rétrécissements coronaires.

Le traitement de la crise angineuse est la trinitrine . Elle doit être, selon sa forme, croquée, sucée ou pulvérisée et gardée quelques minutes sous la langue. Prise dans ces conditions, elle est efficace à faire disparaître la douleur en une à deux minutes.

Le traitement de fond, au long cours, fait appel aux médicaments anti-angineux , bétabloquants, inhibiteurs calciques, dérivés nitrés en particulier.

Lorsque le patient continue de souffrir malgré ce traitement, et lorsqu’on prévoit la possibilité d’un traitement spécifique, on peut, dans certains cas, pratiquer une coronarographie. Cet examen précise les lésions coronaires, le lit artériel d’aval, et guide au mieux l’indication d’un traitement spécifique de ces sténoses quand cela est possible.

L’angioplastie transluminale coronaire (fig. 6) consiste, au cours d’un cathétérisme artériel, à gonfler un ballonnet sous forte pression au contact du rétrécissement coronaire pour le faire disparaître. Il s’agit maintenant d’une technique éprouvée, qui, après sélection soigneuse de l’indication, est efficace plus de quatre fois sur cinq. La récidive de la sténose est toutefois possible dans les six mois qui viennent, dans une proportion d’environ 30 p. 100.

La chirurgie de pontage aorto-coronaire, sous circulation extra-corporelle, permet un traitement radical des sténoses.

L’infarctus du myocarde

Maladie grave qui touche en France chaque année 70 000 patients, l’infarctus est une nécrose ischémique du myocarde: elle correspond à une mort tissulaire par défaut prolongé d’apport sanguin. Le muscle cardiaque fait progressivement place à une cicatrice fibreuse ayant perdu toute possibilité de se contracter. C’est essentiellement le ventricule gauche qui est atteint. L’origine en est presque toujours une occlusion de l’artère coronaire correspondant à un caillot sanguin, un thrombus. Si l’on peut désobstruer l’artère dans les toutes premières heures, il est possible de rendre réversible le processus et d’éviter la constitution d’un infarctus.

C’est en raison de ces notions récentes que l’on assiste, depuis quelques années, à une révolution dans le traitement de l’infarctus du myocarde devenu une véritable course de vitesse pour déboucher l’artère avant l’apparition des lésions myocardiques irréversibles. On considère que, passé deux ou trois heures d’ischémie, le mal est fait.

Cliniquement, le patient ressent une douleur angineuse très intense, sans effort déclenchant le plus souvent. Elle réveille fréquemment le malade dans la nuit. Cette douleur se prolonge et ne cède pas à la trinitrine. Le traitement doit être immédiat: les grands progrès réalisés ces dernières années sont à ce prix. Le patient doit donner l’alerte le plus tôt possible devant une douleur angineuse qui se prolonge au-delà du quart d’heure. Cette alerte est plus facile à donner pour un coronarien ancien, qui connaît la douleur angineuse, que pour celui qui en fait l’expérience pour la première fois. S’il constate que la douleur résiste à la trinitrine, le patient doit immédiatement alerter un transport médicalisé (S.A.M.U.), ou son médecin, qui, sans se déplacer pour épargner le maximum de temps, contactera le transport d’urgence.

Le médecin transporteur confirme le diagnostic par l’électrocardiogramme (fig. 7) et adresse en grande urgence le patient dans un service de réanimation cardiologique (unités de soins intensifs cardiologiques). Ces structures, qui ont vu le jour il y a quinze ans, ont bouleversé le pronostic de l’infarctus en permettant une surveillance permanente et un traitement immédiat des complications éventuelles. Là, une fois éliminées les contre-indications, un traitement intraveineux destiné à dissoudre le caillot, dit traitement thrombolytique , est institué. Dans certains cas, cette thérapeutique est commencée dans l’ambulance même du transport médicalisé. Le traitement est ensuite orienté selon chaque cas particulier. Il comporte souvent des perfusions destinées à améliorer la circulation coronaire, en plus du repos strict au lit et de la surveillance permanente de l’électrocardiogramme.

Il est parfois nécessaire de pratiquer en urgence une coronographie, en particulier en cas d’échec de la désobstruction par voie veineuse afin de visualiser l’obstruction et de la faire disparaître par une angioplastie transluminale. Les dosages sanguins retrouvent une quantité d’enzymes cardiaques déversées dans le sang à partir des cellules myocardiques détruites.

L’évolution est en règle favorable: la fièvre, autour de 38-38,5 0C, disparaît en quelques jours, tandis que les enzymes se normalisent dans le sang. Au bout de cinq à sept jours, le patient est autorisé à se lever et à quitter l’unité de soins intensifs. Au terme de trois à quatre autres semaines de surveillance cardiologique étroite, il regagne son domicile en reprenant progressivement ses activités.

Les complications de l’infarctus sont souvent redoutables. Les troubles du rythme peuvent être responsables de mort subite. Cela explique l’extrême utilité des unités de soins intensifs cardiologiques qui permettent de les dépister immédiatement et, le cas échéant, de les traiter instantanément (choc électrique par exemple).

Les troubles de conduction peuvent être dépistés de la même façon: il est parfois nécessaire de positionner une sonde d’entraînement par voie veineuse dans le ventricule droit pour pallier, grâce à un stimulateur externe, une défaillance du circuit électrique naturel. Parfois, mais de façon exceptionnelle, les troubles de conduction persistent et nécessitent l’implantation d’un stimulateur cardiaque intracorporel définitif. Cette implantation est maintenant réalisée de façon peu traumatique: la sonde est mise en place par voie veineuse, sous contrôle radiologique; elle est ensuite reliée au stimulateur, de la taille d’une boîte d’allumettes, qui est enfouie au niveau du muscle pectoral. La mise en place d’un stimulateur permanent demande environ de 30 à 45 minutes.

L’insuffisance cardiaque traduit une incompétence de la pompe cardiaque lorsqu’une partie importante de son capital contractile est atteinte. À un stade extrême, elle réalise le tableau de choc cardiogénique de pronostic redoutable. La rupture de la paroi infarcie est gravissime. Si le septum interventriculaire est rompu, une communication interventriculaire apparaît. Parfois, la paroi libre du ventricule gauche est intéressée et la rupture est immédiatement mortelle. Sans être rompue, la paroi cicatricielle peut être fragilisée et réaliser un anévrysme du ventricule gauche. Dans cette affection, une partie du muscle cardiaque se déforme de façon paradoxale avec une expansion en systole. Cet anévrysme peut être à son tour à l’origine de complications: insuffisance cardiaque, trouble du rythme, embolie artérielle. Les thromboses veineuses (phlébite, embolie pulmonaire) sont prévenues par le traitement anticoagulant ainsi que les thromboses pouvant se développer au contact de l’infarctus.

Le traitement curatif de l’infarctus a fait de grands progrès, en particulier depuis l’avènement des unités de soins intensifs cardiologiques. Toutefois, le traitement chirurgical reste nécessaire pour corriger un certain nombre de complications de l’infarctus. À un stade évolué, la transplantation cardiaque constitue parfois la seule possibilité et devient d’autant plus logique que les progrès de cette chirurgie sont spectaculaires. Le traitement préventif de l’infarctus se développe de façon très importante, bouleversant totalement l’organisation traditionnelle des soins en raison de l’extrême urgence attachée à son traitement. En effet, la condition nécessaire pour pouvoir enrayer l’infarctus est de le traiter dans les deux à trois heures au plus tard, et, si possible, dans la première heure après le début des symptômes. Cela suppose en particulier une large information du public, coronarien ou non, et une infrastructure adéquate.

Le syndrome de menace

Le syndrome de menace réalise un tableau intermédiaire entre l’angor stable et l’infarctus du myocarde. Il est aussi appelé angor instable. Il correspond à une aggravation d’un rétrécissement préexistant de l’artère, soit par une thrombose, soit par un spasme surajouté, ce qui amène à craindre le passage à l’infarctus du myocarde. On reconnaît cliniquement ce syndrome de menace chez un patient présentant un angor d’effort stable lorsqu’apparaissent des douleurs pour des efforts de plus en plus minimes, devenant, même au repos, plus prolongées, plus intenses, plus fréquentes, et relativement résistantes à la trinitrine. L’électrocardiogramme enregistre au cours des douleurs des modifications caractéristiques correspondant à l’artère coronaire atteinte.

Il s’agit d’une urgence nécessitant une hospitalisation en unité de soins intensifs cardiologiques où le traitement comporte, outre le repos strict au lit et une surveillance permanente de l’électrocardiogramme, une thérapeutique associant un traitement anticoagulant, vasodilatateur des artères coronaires, bétabloquant, c’est-à-dire s’opposant aux effets, néfastes ici, des catécholamines. Une fois le cap passé, et l’angor à nouveau contrôlé, une coronarographie est souvent proposée pour préciser et corriger les lésions responsables.

Quel que soit le tableau réalisé, le coronarien doit veiller scrupuleusement à la correction des facteurs de risque de la maladie athéromateuse responsable de sa maladie. Le tabac doit être immédiatement et définitivement interrompu. En outre, il est nécessaire de corriger un excès de graisse (cholestérol notamment) dans le sang, un diabète, une hypertension artérielle.

Les règles diététiques, toujours nécessaires, ne sont pas toujours suffisantes, et il est parfois utile d’ajouter un traitement médicamenteux pour corriger une hypercholestérolémie, un diabète, une hypertension. La reprise d’une activité physique, sous contrôle cardiologique, est non seulement possible mais souhaitable. Une épreuve d’effort permet de préciser en particulier le bon niveau d’activité physique.

Les cardiomyopathies dilatées

Les cardiomyopathies dilatées sont dues à une diminution progressive de la force de contraction du myocarde. Le cœur ne peut plus faire face aux besoins de l’organisme et il est de plus en plus faible avec la progression de la maladie: le symptôme qui domine est l’essoufflement, tout d’abord pour des efforts importants, puis de plus en plus faibles. Cette maladie touche plus souvent l’homme que la femme, et volontiers autour de la quarantaine.

Le ventricule gauche puis droit se dilate. Il s’agit d’un mécanisme d’adaptation à son insuffisance de façon à essayer d’éjecter un volume sanguin plus grand. Au stade évolué de la maladie, l’essoufflement est permanent, survenant même au repos. Le cœur est rapide. À l’examen, il existe des signes d’insuffisance cardiaque globale avec des râles pulmonaires, épanchements pleuraux bilatéraux, gros foie douloureux, turgescence veineuse et œdème des membres inférieurs. Le diagnostic est confirmé par l’échocardiogramme qui élimine une autre anomalie cardiaque et objective la diminution de la force contractile du ventricule gauche, précise son importante dilatation ainsi que celle du ventricule droit.

Les causes de ces cardiomyopathies sont encore peu connues. Parfois, on retrouve une infection récente à l’origine de la maladie cardiaque et l’on accuse un agent infectieux: il existe d’ailleurs des formes de passage entre la myocardite et la cardiomyopathie dilatée.

La myocardite aiguë est une infection du myocarde réalisant, dans un tableau infectieux bruyant avec fièvre, stigmates biologiques d’infection, un tableau d’insuffisance cardiaque parfois dramatique. Lorsque le contrôle de l’infection est possible, l’insuffisance cardiaque régresse parallèlement. Mais il existe des formes de passage où, après un tableau fébrile plus ou moins bruyant, le patient développe, quelques mois ou quelques années plus tard, une cardiomyopathie dilatée.

La grossesse a été accusée de déclencher dans certains cas, très exceptionnels, des cardiomyopathies (syndrome de Meadows).

Surtout, l’éthylisme est souvent retrouvé comme seul facteur susceptible d’expliquer la cardiomyopathie dilatée. Le sevrage absolu et définitif est indispensable. À ce prix, il a été observé une stabilisation, voire des guérisons tout à fait spectaculaires. L’hypothèse d’une toxicité de l’alcool vis-à-vis du myocarde est généralement admise.

L’évolution est très souvent péjorative, se faisant vers l’aggravation progressive de l’insuffisance cardiaque selon une évolutivité propre à chaque patient. Les troubles du rythme sont fréquents et contribuent à aggraver encore le fonctionnement de la pompe cardiaque. Le traitement comporte, outre le sevrage en alcool, le régime sans sel, les digitaliques et les diurétiques. Les vasodilatateurs sont venus récemment renforcer l’arsenal thérapeutique avec une grande efficacité. Le progrès probablement le plus important dans cette maladie est constitué par la transplantation cardiaque. Cette-ci, de plus en plus banale grâce aux fantastiques progrès de la chirurgie et de la chimiothérapie immunosuppressive, constitue, dans un nombre croissant de cas, le traitement radical de cette maladie grave.

Les cardiomyopathies obstructives

Dans les cardiomyopathies obstructives, il existe une hypertrophie anormale, localisée au niveau du septum interventriculaire, dans la chambre de chasse du ventricule gauche. Aussi, en systole, lorsque cette partie du muscle se contracte, elle provoque un obstacle appelé «dynamique» à l’éjection du ventricule gauche. En d’autres termes, le cœur se gêne lui-même pour éjecter le sang. Cette affection atteint souvent les sujets d’une trentaine d’années; il existe des formes familiales.

Les signes cliniques sont dominés par l’essoufflement à l’effort, les palpitations, voire les syncopes. L’auscultation perçoit un souffle systolique dû à la turbulence engendrée par le sang qui se fraye un passage à travers l’obstacle musculaire. L’échocardiogramme avec doppler précise la maladie et l’importance hémodynamique de l’obstacle. L’évolution est menacée par la mort subite, souvent en rapport avec un trouble du rythme. Les efforts physiques sont en particulier déconseillés. Le traitement est surtout médical: béta-bloquants, en particulier pour s’opposer aux effets des catécholamines. Dans certains cas, il est nécessaire de recourir à la chirurgie (incision du bourrelet musculaire).

Les péricardites

Dans les péricardites, l’inflammation du péricarde entraîne un écoulement liquidien entre les deux feuillets normalement accolés, et qui vont se trouver séparés et former une cavité qui se remplit tout autour du cœur. On distingue la péricardite aiguë et la péricardite chronique constrictive.

La péricardite aiguë

La péricardite aiguë est une maladie fréquente, très souvent bénigne. Succédant souvent, quelques semaines après, à une infection virale (rhinopharyngée en particulier), elle atteint volontiers l’adulte jeune. Elle se manifeste essentiellement par des douleurs thoraciques, derrière le sternum, irradiant le cou et les membres supérieurs. Un élément très caractéristique: la douleur péricardique est augmentée à l’inspiration profonde, à la toux; elle est modifiée selon la position du thorax. La douleur s’accompagne de fièvre autour de 38 0C. À l’auscultation cardiaque, on perçoit un bruit caractéristique entendu à la fois dans la systole et dans la diastole: le frottement péricardique. L’électrocardiogramme objective des anomalies spécifiques diffuses dans toutes les dérivations traduisant le caractère circonférentiel de l’épanchement. La radiographie du thorax montre un élargissement de l’ombre cardiaque «en carafe». L’échocardiogramme est un examen capital objectivant l’épanchement, précisant son importance et permettant de suivre l’évolution de la maladie. Celle-ci est très rapidement favorable avec disparition progressive de tous les signes et guérison complète. Les rechutes sont possibles mais rares. Le traitement comporte le repos au lit plusieurs jours, l’aspirine ou les anti-inflammatoires, associés dans certains cas à des antibiotiques.

Les complications sont surtout le fait des autres causes de péricardite: tuberculeuses, purulentes (secondaires à une infection de voisinage), néoplasiques (secondaires à un cancer). Dans ces formes, la principale complication, très redoutable, est l’évolution vers la tamponnade . Cette éventualité très grave est due au caractère compressif du liquide péricardique, qui, continuant de s’écouler dans une cavité inextensible, fait de plus en plus pression sur le cœur lui-même et altère ses conditions de fonctionnement. Quand le liquide péricardique devient abondant (parfois 800 cm3, voire un litre), il gêne le remplissage du cœur et entraîne ainsi une chute du débit cardiaque avec stases veineuses. Le tableau clinique est souvent dramatique, avec apparition rapide d’un état de choc, distension veineuse, gros foie de stase. Le traitement doit être entrepris en grande urgence: il consiste en une ponction du péricarde à l’aiguille, suivie par un drainage chirurgical. Le traitement de la maladie de fond conditionne l’évolution ultérieure.

La péricardite chronique constrictive

Le péricarde est ici transformé en une gangue fibreuse, épaisse, plus ou moins calcifiée, rigide. Elle atteint plutôt les patients dans la deuxième partie de la vie. La cause la plus fréquente est le tuberculose, mais les péricardites purulentes en particulier peuvent aussi évoluer vers la constriction. L’expansion du cœur pendant son remplissage (en diastole) s’en trouve gênée. Ce syndrome diastolique entraîne une stase veineuse et une diminution du débit cardiaque. À l’examen, il existe une turgescence veineuse avec œdème des membres inférieurs, épanchement liquidien dans les plèvres (épanchements pleuraux) et dans la cavité abdominale (ascite). Le tout est secondaire à l’hypertension veineuse. L’auscultation cardiaque peut percevoir un bruit particulier (vibrance péricardique). La radiographie thoracique peut révéler des calcifications péricardiques. L’électrocardiogramme témoigne notamment des anomalies du rythme auriculaire.

L’échocardiogramme objective un péricarde épaissi, dense. Le cathétérisme cardiaque affirme le diagnostic en montrant les modifications des pressions intracardiaques secondaires à la constriction. Le traitement médical n’est que palliatif: le traitement curatif est chirurgical. C’est la péricardectomie, ou décortication : le chirurgien pratique l’ablation de cette gangue autour du cœur.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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